Avertissement :
le texte décrit le sentier tel que je l'ai parcouru il y a une trentaine d'années. Des choses ont pu changer depuis ! Si vous voulez partir sur mes traces, prenez la précaution de préparer votre randonnée avec les outils d'aujourd'hui (cartes, guides...), c'est plus prudent !
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De nombreux lacets sur le flanc de la pente raide entre des broussailles mènent en haut du vallon du Dittenthal qui dévale vers Niederbronn. Mais avant de descendre, un détour s'impose vers le sommet du Ziegenberg.
Ce contrefort du Wintersberg est couronné d'une enceinte en pierres sèches, sans ciment ni attaches ; à l'intérieur du périmètre clos, les arbres sont bas, mais le tapis de feuilles sèches est épais au point qu'on y enfonce ; près du promontoire septentrional, d'où la vue se dégage vers Niederbronn, on a retrouvé deux dalles dressées l'une derrière l'autre. On a supposé que ce sommet était un sanctuaire celte, en lien avec le culte de la déesse-mère au col de la Liese, mais les fouilles effectuées n'ont permis de découvrir ni armes ni ustensiles.
Sur le versant du Diettenthal, nous rejoignons la direction de la vallée. Les pins refont leur apparition, et par endroits les feuilles rouges des hêtres et des chênes sont de nouveau remplacées par les aiguilles et les pommes de pin qui roulent sous le pied. Je longe bientôt le torrent qui a creusé cette gorge, et en quelques minutes, j'atteins la source Lichteneck et le fond de la vallée. Sur la montagne qui me fait face, comme un aigle accroché à son aire, apparaissent le Wachtfelsen et le Wasenbourg.
La source Lichteneck est l'une des nombreuses sources qui avaient rendu le site de Niederbronn célèbre depuis l'époque romaine. Naguère, elle jaillissait, solitaire, à la sortie de la ville, sous un abri couronné d'une petite coupole qui lui donnait un petit air de temple antique revu par le modern'style. On pouvait voir des gens remplir leurs bouteilles au lent écoulement du filet d'eau. Maintenant, elle est exploitée industriellement, la source existe toujours, mais l'usine qui la jouxte lui enlève beaucoup de son charme.
> Visiter Niederbronn...
Près de la gare, jolie construction blanche entourée de fleurs qui ressemble tellement à toutes les gares qu'elle me fait penser à celle de mon train électrique, je passe sous la voie ferrée qui joint Haguenau et Bitche, et je remonte l'allée des tilleuls.
Les maisons se font plus rares, et, la dernière dépassée, le sentier grimpe dans la forêt. On passe devant une petite source dans une clairière, un endroit charmant connu nous le nom de "Roi de Rome", en souvenir de l'Aiglon, au destin si tragique.
Au sortir des taillis, me voici dans une superbe futaie de pins ; il fait clair, le soleil esquisse d'énigmatiques dessins sur le sol ; les rayons jouent entre les branches ; ici, ils font miroiter une toile d'araignée sur laquelle perlent encore quelques gouttes de rosée, là ils font flamboyer les feuilles mortes d'un chêne égaré. Çà et là, des rochers éparpillés jonchent la pente entre les troncs droits des sapins. Le Wasenbourg apparaît entre les arbres, mais sur l'autre versant du vallon. Il reste à remonter jusqu'au fond de la profonde gorge qui sépare ce versant de lui. Mais qu'importe, l'air et doux et parfumé par les odeurs de résine et il fait bon marcher.
Les chênes et les hêtres ont de nouveau remplacé les pins élancés, les feuilles sèches qui perdent leurs couleurs éclatantes ont remplacé les innombrables plants de myrtilles qui tapissaient le sous-bois.
La forêt s'ouvre enfin sur un décor fantastique : au fond, l'énigmatique Wachtfelsen ; devant moi, imposant, le Wasenbourg.
> Visiter le Wasenbourg
> L'histoire du Wasenbourg
Le Wasenbourg est maintenant derrière moi.
La forêt est toujours aussi attachante, encombrée parfois de taillis ou de fougères.
Là-bas, un bosquet de sapins, au milieu des chênes et des hêtres, aux arbres serrés les uns contre les autres, tache sombre au milieu des jeunes feuilles vert tendre, semble une poignée de guerriers encerclés, formant le dernier carré face à l'ennemi ; et pendant un instant on aurait l'impression de se trouver transporté au pied des remparts de Troie.
La forêt s'ouvre une clairière ; la vue se dégage vers Oberbronn et les derniers moutonnements des collines. Non loin, un chaos de rochers épars, dont certains semblent avoir été sculptés par l'homme, porte le nom de "place des sorcières". Son origine reste un mystère. Etait-ce un lieu de culte, un cimetière préhistorique ? L'imagination peut s'envoler et rêver au sabbat des sorcières ou au ballet des fées. Songe d'une nuit d'été ou bacchanale de Faust.
A l'autre extrémité de la clairière, voici le Kreutztannen. Le nom évoque un carrefour et des sapins. En effet, quelques sapins isolés s'y dressent avec superbe. De beaux arbres, élancés, majestueux, fiers. Le carrefour est là aussi, non seulement plusieurs sentiers, mais aussi hélas une mauvaise route forestière, chaotique et semée d'ornières, et c'est assez pour en faire un campement de touristes bruyants, qui remplissent la forêt de bruits de moteurs, de ronflements de motos et d'odeurs de gaz d'échappement.
Le Wasenkoepfel qui se présente devant mes pas en semble tout attristé. Les feuilles, malgré le soleil, n'ont plus d'éclat. Mais petit à petit la forêt étouffe ces bruits sacrilèges et le silence n'est plus habillé que par le bourdonnement des insectes ou le chant d'un oiseau. C'est un instant de rédemption et de bonheur.
Le sentier large serpente et arrive au sommet, face à la tour ; il y a là une plaque en l'honneur d'Auguste Stoeber (1808-1882), célèbre poète et archéologue alsacien.
La tour est trop basse ; on dirait qu'elle cache sa honte entre les sommets des grands arbres ; honte d'entendre du monde au Kreutztannen, et de voir si peu d'amoureux de la nature consentir à faire taire et à abandonner leurs machines pour monter jusqu'à elle ; honte de se sentir délaissée, inutile... Mais elle sait récompenser ceux qui le font, gratuitement, pour le plaisir : pour remercier l'infatigable pèlerin d'avoir gravi ses modestes 521 mètres d'altitude, elle offre, entre quelques arbres qui semblent se pencher pour laisser voir, une échappée sur la suite de notre chemin, illuminé par le soleil généreux de cette fin de printemps : paré d'un léger voile de brume, le Lichtenberg, accroché à son rocher, se laisse entrevoir comme un appel. Tout autour, les chaînes de montagnes s'étagent en gradins... C'est comme la révélation fugitive d'un autre monde pour redonner courage au pèlerin et le remettre en marche, comme la lumière de la transfiguration sur le chemin de la passion.
Sur l'autre versant, le chemin est encombré de troncs d'arbres abattus ; les conifères règnent en maîtres. En peu de temps, à travers la forêt où le soleil et les branches inventent sans se lasser d'innombrables figures pleines de fantaisie, je rejoins la petite route qui a conduit la foule au Kreutztannen, et, quelques pas plus loin, le Col de l'Ungerthal. C'est, à 438 mètres d'altitude, un important carrefour de chemins. L'un descend vers le nord et mène à Niederbronn par Breitenwasen, où on trouve plusieurs scieries et une charmante chapelle, perchée sur un promontoire ; un autre conduit vers l'Immenkopf, où passe une route forestière que nous allons emprunter pour quelques pas ; elle a évidemment le désavantage pour des piétons d'être goudronnée, ce qui y attire des voitures, et il y a, comme au Kreutztannen, trop de monde à l'Ungerthal. Mais les piétons ont un avantage que n'ont pas les automobilistes : ils peuvent profiter des échappées que leur offre la route vers la vallée, où la rivière s'étale en paresseux méandres ; de loin en loin, quelques fermes dorment à l'ombre des sapins. Aucune trace de vie, sinon parfois un chien qui aboie à mon passage.
Voici le carrefour du Holdereck, à 408 mètres. Des altitudes gentilles, qui font sourire, dans une nature attachante, humaine et souriante. Une provision de délicatesse et de légèreté avant d'aborder les rochers raides et les promontoires abrupts dressés comme un jet fou face à l'infini. Une charmante petite source coule sous les ramures dans un babil chantant. Le sentier a heureusement quitté la route, et grimpe doucement le long la montagne. Mais la sérénité est de courte durée : en sortant de la forêt, c'est de nouveau la même désagréable surprise : un malheureux chemin forestièr a encore amené ici la grande foule : les uns se font bronzer à grand renfort d'huile solaire, les autres font tonitruer leurs transistors. Toute la nature, pourtant si paisible, en est troublée, ternie. Ne vous y trompez pas, je n'ai rien d'un misanthrope, ce n'est pas la présence de mes semblables qui me gêne ; combien serais-je heureux de les voir communier à la sérénité de ces lieux enchanteurs et de les entendre psalmodier à la gloire du Créateur. Mais cette foule bruyante et égoïste, qui prétend venir ici pour fuir la promiscuité des villes, et qui ne fait que l'y transporter, j'ai bien du mal à la supporter. Je les dépasse vite, je les fuis, non sans pitié.
Cet endroit qui a tout pour être charmant n'est autre que le col du Holdereck. Nous atteignons le sommet de l'Arnsberg et nous franchissons la limite des départements pour faire une incursion en Moselle.
Sur le col se trouvent de grandes bornes en grès ; elles signalent maintenant la limite des départements, mais elles marquaient autrefois la limite de la seigneurie de Borne et du comté de Hanau-Lichtenberg ; elles portent la date de 1764, et d'un côté les initiales HL (Hanau-Lichtenberg) et de l'autre HB (Hohenlohe-Bartenstein, seigneurs d'Oberbronn). Elles datent d'un partage de ces seigneuries.
Un chemin creux dans la haute futaie de chênes a tôt fait d'amener au pied du château de Grand Arnsbourg.
> Découvrir le Grand Arnsbourg...
Le sentier descend maintenant le long du cône abrupt du château, qui ne tarde pas à se cacher derrière les arbres ; la crête abrupte est hérissée d'un chapelet de petits rochers qui prolongent celui du château.
A travers une forêt de petits arbres, on atteint le rebord de la vallée, et en quelques lacets, la route qui suit la vallée de la Zinsel.

© Bonnet 2003

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