La rage : toujours aussi grave.

> Contamination> Etude clinique> Chez les animaux> Diagnostic au laboratoire
> Epidémiologie> Prévention> Pour la petite histoire> Un conseil
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Connue depuis l’antiquité, la rage est toujours d’actualité en raison de son extension mondiale et de sa progression régulière en Europe. Elle touche tous les continents à l’exception de l’Australie, du Japon, de la Nouvelle-Zélande et des îles du Pacifique. En Europe, les îles Britanniques, les pays scandinaves, l’Espagne et le Portugal sont libres de rage. Maladie infectieuse commune à l’homme et à toutes les espèces animales à sang chaud, principalement les mammifères, elle est due à un virus transmis généralement par la morsure d’animaux présentant ou non les symptômes de l’infection rabique, abritant le virus dans leur salive. La vaccination orale de la faune sauvage pratiquée systématiquement a permis une régression spectaculaire.

La contamination :
Chez l’animal, le virus introduit dans l’organisme par la morsure d’un animal enragé se multiplie d’abord localement puis chemine par voie nerveuse (il n’y a pas de virémie) jusqu’au système nerveux central d’où il diffuse, par voie nerveuse, vers les organes périphériques, notamment l’œil et les glandes salivaires. L’infection de ces dernières entraîne celle de la salive ; l’animal devient alors un excréteur de virus et sa morsure peut être contaminante. Les mammifères terrestres, en particulier les carnivores et herbivores domestiques, n’excrètent le virus que pendant les derniers jours précédant leur mort (quelques jours avant l’apparition des signes de rage et pendant la phase clinique inéluctablement mortelle). Par contre, certains animaux sauvages, dont les chauves-souris, peuvent excréter le virus dans leur salive pendant de longues périodes avant la phase clinique terminale, ce qui en fait des agents de contamination redoutables.
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Etude clinique :
L’homme et tous les mammifères sont réceptifs.
La contamination est réalisée presque exclusivement par la morsure d’un animal infecté et excréteur de virus. Le virus ne traverse pas la peau intacte.
L’incubation, totalement silencieuse, dure de quelques semaines à quelques mois, et varie en fonction de la souche de virus, (espèce et origine géographique de l’animal mordeur) et surtout de la gravité (nombre, profondeur) et de la localisation des morsures : les morsures à la tête donnent les incubations les plus courtes.
La rage déclarée chez l’homme débute par des douleurs et du prurit au niveau de la cicatrice de la morsure. Bientôt le malade présente des modifications du caractère et de l’affectivité. Brutalement éclatent des crises d’agitation avec contractures et spasmes provoqués par les plus légères excitations sensorielles. Ces spasmes bloquent notamment l’oropharynx, d’où l’impossibilité de déglutir, en particulier les liquides. Inquiet, redoutant la répétition de ces crises, le malade refuse de boire (hydrophobie). On note de rares formes démentielles et des formes paralytiques (paralysie ascendante, myélite, encéphalite). Dans tous les cas, la rage déclarée chez l’homme est toujours mortelle en dépit de toutes les tentatives de traitement.
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La rage chez les animaux
Chez le chien, la maladie débute par un changement de comportement ou par une fugue. Puis rapidement éclatent des crises furieuses au cours desquelles l’animal mord tout ce qui passe à sa portée. Des paralysies apparaissent de la mâchoire, de la langue, de l’oropharynx (mais il n’y a jamais d’hydrophobie). L’affection peut revêtir d’emblée une forme purement paralytique. Dans tous les cas la mort survient en quelques jours.
Chez le chat, les manifestations furieuses sont impressionnantes et les morsures toujours graves.
Les herbivores domestiques, en particulier les bovins, font une rage paralytique.
Le renard, vecteur sauvage principal de la maladie en Europe et en France, perd sa réserve habituelle : il s’introduit sans crainte dans les fermes et les villages et attaque les animaux domestiques et l’homme.
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Diagnostic au laboratoire
Tout cas suspect de rage (surtout s’il y a risque de contamination humaine) doit être confirmé par l’examen du cerveau de l’animal en cause. Si l'animal doit être abattu (chien devenu agressif par exemple), il faut autant que possible ne pas endommager le cerveau.
L’autopsie et le prélèvement, dangereux, ne doivent être pratiqués que par un personnel entraîné et vacciné. L’expédition au laboratoire spécialisé doit être faite en respectant des règles précises d’emballage évitant tout risque de contamination en cours de transport.
La détection de l’antigène dans le cerveau permet un diagnostic rapide (en quelques heures) ce qui est d’un intérêt capital pour la décision à prendre vis-à-vis des sujets mordus.
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Epidémiologie
La rage sauvage se présente sous des aspects très différents. Chaque région géographique a son vecteur préférentiel : loup au Moyen-Orient, chacal en Afrique, mangouste en Afrique du Sud, renard, mouffette et raton laveur en Amérique du Nord. En Europe, la rage sauvage est transmise essentiellement par le renard. Partie des frontières de l’Europe de l’Est en 1939-1940, elle a atteint de proche en proche tous les pays européens, (dont la France en 1968) à l’exception actuellement des pays scandinaves, des îles Britanniques et de la péninsule Ibérique.
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Prévention
Elle est fondée sur trois facteurs :
  • Le contrôle des espèces sauvages réservoirs et vectrices de la rage est assuré par la destruction d’un nombre d’individus suffisant pour ramener la densité de leur population au seuil ne permettant plus la transmission. Dans les Vosges, on a expérimenté avec succès la vaccination des renards au moyen d’appâts contenant un vaccin vivant atténué.
  • La lutte contre les vecteurs que sont les animaux domestiques, chiens et chats notamment, réside dans l’application des mesures des polices sanitaires : obligation de la tenue en laisse, du port de la muselière, capture des chiens errants, abattage des chiens ayant été contaminés par un chien enragé.
  • Ces mesures sont complétées par la vaccination : pour les chiens et les chats, deux injections de vaccin à trois semaines d’intervalle lors de la primo-vaccination suivie de rappels annuels ; ce vaccin peut être associé à d’autres vaccins canins (maladie de Carré, hépatite, leptospirose) ; pour les bovins, une seule injection annuelle d’un vaccin avec adjuvant ou associé au vaccin contre la fièvre aphteuse notamment.
L’information du public doit recommander :
  • d’éviter dans les zones infectées tout contact avec des animaux domestiques de comportement suspect ou avec tout animal sauvage ;
  • de ne pas importer dans une zone indemne un animal en provenance d’une zone ou d’un pays infectés ;
  • de ne pas emmener dans une zone ou un pays infectés un animal familier (chien ou chat) sans l’avoir préalablement vacciné ;
  • de signaler immédiatement toute morsure, griffure ou léchage ;
  •  de prendre à cette occasion toutes les mesures nécessaires :
    • L’animal suspect d’avoir provoqué une contamination humaine devra dans toute la mesure du possible être retrouvé. S’il est vivant, il sera soumis à une surveillance vétérinaire avec un premier examen dès que possible, un second sept jours après la morsure et un troisième au quinzième jour. Si l’animal reste vivant et bien portant au cours de cette période, le risque de contamination est écarté. Si l’animal meurt ou s’il est abattu au cours de cette période de 15 jours, sa tête ou son cadavre entier doivent être adressés d’urgence au laboratoire spécialisé.
    • Les blessures (morsures, griffures) seront le plus rapidement possible nettoyées à l’eau savonneuse et désinfectées avec un produit doué d’action rabicide (ammoniums quaternaires en particulier). Les sutures, si elles sont nécessaires, seront différées de quarante-huit heures. Un traitement antitétanique sera appliqué.
    • Le « traitement antirabique spécifique », avec un vaccin préparé sur cultures cellulaires, sera commencé sans délai et comportera 6 injections pratiquées aux jours 0, 3, 7, 14, et 90. Ces nouveaux vaccins ne donnent pratiquement aucune réaction ni locale ni générale. En cas de morsure grave, on administre, en même temps que la première injection de vaccin, et en une seule fois, des immunoglobulines antirabiques d’origine humaine.
    • Les personnes exerçant, dans les zones infectées, une profession les exposant à des risques permanents ou répétés de contamination doivent recevoir une vaccination préventive qui comportera deux ou trois injections de vaccin espacées sur quatre semaines, suivies d’un premier rappel après un an, puis des rappels ultérieurs tous les trois ans.
(d'après l'Encyclopedia Universalis)
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Pour la petite histoire : la rage n'a pas attendu 1968 pour arriver dans les Vosges ! En 1885, le jeune Joseph Meister, de Maisonsgoutte (Val de Villé), est sérieusement mordu par un chien enragé en défendant des enfants menacés par l'animal. Pour lui, ça signifie à brève échéance la mort dans d'atroces souffrances. Mais la famille entend parler d'un biologiste franc-comtois, Louis Pasteur, qui aurait mis au point un traitement contre la rage. Le jeune homme est conduit auprès de lui. Après bien des hésitations, le 6 juillet, Pasteur, qui n'est pas médecin, vaccine le jeune homme, qui est sauvé.



Quelques conseils : la rage n'est pas éradiquée dans les Vosges !


En savoir plus : Centre Anti-Rabique en Alsace (Hôpital civil de Strasbourg) : 03 90 24 38 43