Histoire du Saint Ulrich...

Pendant le règne du roi Conrad II, apparaissent des sires de ce nom, occupant une place-forte peut-être fondée par les tout-puissants Eguisheim-Dagsbourg, au-dessus du village de Ratpoldivilare. Toujours est-il qu'en 1038 un certain Reginbold, du "castrum Reginboldipetra" se vante d'avoir vaincu et tué le comte Gérard d'Eguisheim qui avait pris les armes contre lui pour faire cesser ses brigandages. Sa mort fut pleurée par toute la contrée et par l'empereur qui était cousin de son père. Il est dont probable qu'un petit château existe alors au-dessus de Ribeauvillé.
D'où viennent ces turbulents seigneurs qui donnent l'impression de n'avoir peur de rien ni de personne pour oser s'attaquer victorieusement aux plus grands ? On n'en sait rien. Eux-mêmes prétendaient qu'ils descendaient des ducs de Spolète, en Italie. Ils auraient suivi l'empereur Conrad en Alsace, puis se seraient installés à Ribeauvillé.
C'est bien improbable. Peut-être simplement les Ribeaupierre viennent-ils du village, comme ministériels impériaux, car le fief est d'abord aux mains de l'empire ; ce n'est qu'en 1084 qu'il est donné par Henri IV à l'Eglise de Bâle, pour remercier l'évêque de son soutien pendant la querelle des investitures. Il est repris en 1114 par Henri V qui en a "un besoin pressant" et enfin définitivement rendu par Frédéric Barberousse ; la première lignée de Ribeaupierre s'étant éteinte, l'évêque confie le fief à un autre ministériel de l'empereur, Egenolf d'Urslingen, dont les descendants reprendront le nom de Ribeaupierre.
Au 13ème siècle, Egenolphe de Ribeaupierre fonda Dusenbach, dans un vallon proche de Ribeauvillé, pour remercier la Vierge de l'avoir sauvé d'un accident. Rodolphe de Habsbourg élèvera la lignée à la dignité de chevaliers d'empire. Le 27 octobre 1281, il passa la nuit au Grand Ribeaupierre, puis en 1287, il y met le siège, pour contraindre Anselm à rendre à ses frères leurs droits sur l'héritage de leur père. Mais il rencontre de telles difficultés que ses troupes sont sur le point de se révolter. Il se contente alors de bloquer Anselm en occupant Zellenberg et en construisant une bastide de siège à Guémar. Après maintes péripéties, le turbulent Anselm finit par être vaincu. La seigneurie est alors partagée : le Grand-Ribeaupierre et le Stein, avec une part de Ribeauvillé et divers villages du nord de la seigneurie ; le Haut-Ribeaupierre, avec une autre part de Ribeauvillé, et les villages du sud ; enfin le Hohnack, et divers biens près de Kaysersberg.
L'histoire du château semble alors calme. Elle accompagne l'ascension régulière de la famille. En 1371, le droit de quenouille, c'est-à-dire de transmettre le fief aux filles en l'absence d'héritier mâle, est octroyé par l'évêque de Bâle, toujours suzerain : le château est alors appelé Niederburg. L'aveu du fief à l'Eglise de Bâle est confirmé en 1398 et 1400 par Maximin de Ribeaupierre. La chapelle en l'honneur de Saint Ulrich, évêque d'Augsbourg, est consacrée en 1435 et un chapelain est attaché à son service : c'est elle qui donnera au Grand Ribeaupierre son nom actuel. Un petit pèlerinage y demeurera un temps même après l'abandon du château.
Mais dès cette époque, le château est laissé à l'abandon. A la fin du 15ème siècle, les Ribeaupierre n'habitent plus que leur château dans la ville de Ribeauvillé et le splendide Saint Ulric tombe lentement en ruine. Une petite garnison l'occupe encore lors de la guerre de Trente ans qui voit sa ruine définitive.
Le domaine passe aux comtes palatins de Birkensfeld à l'extinction de la lignée. C'est de cette famille que descend celle qui occupa le trône de Bavière : le prince Max, qui résida à Ribeauvillé, eut pour fils Louis Ier, et la dynastie connut un destin tragique.